Pour sauver le poisson, il faut sauver le Grand Bleu

Ibrahim Gueye
Photo: Christoph Goettert
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Île de Gorée victime de l’érosion côtière de la rareté des produits halieutiques

Sans pression rien ne bouge ?

Il m’est arrivé de séjourner sur les îles espagnoles des Canaries où j’ai souvent rencontré des pêcheurs industriels qui, sans se soucier de ceux qui étaient autour d’eux, parlaient bruyamment en se jetant des fleurs à propos de leurs belles prises sur les côtes sénégalaises une fois arrivés au bar des hôtels où ils séjournaient. Loin des frontières sénégalaises, loin des représailles, pourrait-on dire !

Compte tenu de ce comportement ignoble des pêcheurs industriels, qui raclent les fonds de la mer en emportant tout dans leurs filets, il est temps que le gouvernement sénégalais mette la pression sur les pêcheurs-pilleurs en faisant tout simplement appliquer les accords de pêche dans un premier temps et de les réviser à son avantage une fois qu’ils seront arrivés à leur terme. Si la Norvège a refusé de devenir membre de l’Union européenne, c’est surtout pour préserver ses ressources halieutiques qu’elle défend bec et ongles contre les chalutiers de ses voisins européens.

Sauver le Grand Bleu ou les océans qui risquent de devenir un désert maritime requiert un effort global mais chaque pays peut sauvegarder son espace maritime. Si le Sénégal subit les assauts de la mer qui rogne ses côtes (érosion côtière). Si nos populations et nos usines déversent les déchets ménagers et industriels directement en mer sans les faire passer par des stations d’épuration, sans compter la surpêche dont a parlé plus haut, on ne devrait pas s’étonner de la rareté de nos ressources halieutiques.

Les solutions

Le Sénégal a encore des atouts dans ses ressources humaines qualifiées et mondialement connues. Prenons une organisation comme la CAOPA (Confédération Africaine des Organisations de la Pêche Artisanale) dont le siège se trouve à Mbour et dont le président est le Sénégalais Gaoussou Guèye, lutte depuis des décennies pour sauvegarder le pêche côtière. Prenons aussi l’AFRIFISCH-net, (Plateforme des Acteurs non Etatiques de la Pêche et de l’Aquaculture), dont le siège se trouve au Kenya et que préside le même Sénégalais, notre pays devrait pouvoir tirer plus de profits de ses ressources halieutiques en mutualisant toutes ses ressources humaines y compris les députés de la diaspora.

Au Sénégal, il faut tout simplement que le gouvernement applique les sanctions contre tous les acteurs de la pêche qui sont hors la loi ; Sénégalais comme étrangers.

Valorisation des produits halieutiques

Le Sénégal doit arrêter d’exporter du poisson et des fruits de mer non transformés pour augmenter la plus-value. Ce qui est valable pour les produits miniers devrait aussi l’être pour les produits halieutiques. Certains poissons et les fruits de mer comme les crevettes et les langoustes sont des produits de luxe en Europe. Ces produits ne devraient jamais être comparés avec les produits d’élevage qui n’ont aucun goût et qu’on voit sur les étagères des supermarchés en Europe. Il faut que le Sénégal fasse une campagne marketing en exposant ses produits halieutiques sur des stands haut de gamme. Se mettre au-dessus de la mêlée en prenant le pari de vendre moins de produits mais beaucoup plus cher. Cette stratégie passe par une campagne de dégustation sur chaque Salon d’alimentation à travers le monde.

Produits halieutiques congelés au Sénégal prêts pour l’exportation


Une grande partie des produits halieutiques ci-dessus devraient être transformés avant l’exportation. Les mêmes produits sans tête coûtent cinq fois plus cher sur les étals des supermarchés en Europe. Sans oublier que les têtes ne sont pas des déchets mais sont transformés pour en faire du bouillon de poisson très apprécié et utilisé dans tous les restaurants. Concernant le poisson et les fruits de mer, rien ne se perd, tout se transforme.